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Dyslexie : et si c’était un atout ?

19 octobre 2023

Dyslexie : et si c’était un atout ?

Longtemps vue comme un trouble handicapant, la dyslexie est de plus en plus envisagée comme une ressource potentielle à condition, bien sûr, d’être diagnostiquée et accompagnée.


La dyslexie est un trouble qui perturbe l’apprentissage sans remettre en cause l’intelligence de la personne concernée. Elle touche l’acquisition du langage écrit en rendant plus difficile l’automatisation du processus de lecture. Cela se caractérise le plus souvent par l’inversion de syllabes et de lettres qui se ressemblent ou encore par une difficile association entre les sons et les lettres. Depuis 1993, la dyslexie est reconnue comme un handicap pour l’OMS. Pour qu’ un diagnostic soit posé, plusieurs conditions doivent être remplies : les difficultés doivent être durables et ne doivent pas être psychoéducatives, la personne ne doit pas souffrir de déficience intellectuelle et les autres causes possibles telles que les troubles de la vue ou de l’audition doivent avoir été éliminées.

Des avantages insoupçonnés

Décrite ainsi la dyslexie semble être très handicapante et ne présenter que des inconvénients. Cependant, récemment, des études scientifiques se sont penchées sur les qualités spécifiques dont héritent les personnes dyslexiques. En ce sens, Audrey Mazur, ingénieure de recherche à l’ENS Lyon, affirme que le terme de « neurodiversité » est de plus en plus privilégié car « c’est une bonne façon de reconnaître qu’il existe des qualités spécifiques chez ces personnes ».


Tout d’abord, la capacité à voir le tout est prédominante chez les personnes dyslexiques. En effet, elles s’attardent moins sur les détails et prennent chaque problème dans son ensemble ce qui leur permet de réfléchir de manière plus stratégique et, ainsi, de trouver des solutions plus performantes. Cette qualité est très utile dans de nombreux domaines comme l’entreprenariat ou la course automobile, milieu dans lequel les personnes dyslexiques sont surreprésentées. Ainsi, une étude menée en 2007 par Julie Logan a montré que sur 139 entrepreneurs américains interrogés, près d’un tiers sont dyslexiques.

De plus, les dyslexiques font souvent preuve d’une grande aisance à l’oral, une qualité développée en compensation de leurs difficultés à l’écrit. En outre, elles se révèlent parfois plus créatives : leur cerveau fonctionnant différemment, elles trouvent des idées et des chemins originaux pour parvenir à un objectif.

Une place d’outsiders

En dépit de leurs nombreuses qualités, la société se retrouve bien souvent en incapacité d’intégrer correctement tous les dyslexiques. À commencer par le système scolaire français qui n’est pas encore adapté à leurs troubles de l’apprentissage en imposant une notation permanente, en laissant peu de place aux problématiques individuelles et en instaurant une vision de la réussite très normée. En outre, on observe, en France, une sacralisation de l’écrit et de l’orthographe qui peut très facilement pénaliser les personnes dyslexiques lors d’une recherche d’emploi par exemple. Face à ces difficultés d’intégration, certains arrivent à s’imposer en développant des compétences compensatoires : meilleure organisation, grosse capacité de travail, choix des bonnes personnes pour s’entourer.

Cependant, ces exemples de réussites ne reflètent pas totalement la réalité. Ces personnes sont souvent issues d’environnements sociaux favorables qui les poussent et les aident au maximum. Toutes n’ont pas cette chance puisqu’on observe un lien de corrélation entre dyslexie et exclusion sociale : environ 50% des sans domicile fixe et des détenus en prison sont dyslexiques.

Sortir du cercle vicieux

Trouble de l’apprentissage entraînant des difficultés à l’école, lesquelles vont ensuite être accentuées par le sentiment d’échec et le complexe d’infériorité que vont ressentir les enfants. Finalement, cela peut mener à un manque de motivation et même parfois à des troubles de la personnalité. Bref, un cercle vicieux infernal. En ce sens, une étude allemande réalisée en 2020 sur 3 000 enfants a montré que la dépression et l’anxiété étaient plus élevée chez les élèves ayant des troubles de l’apprentissage. Pour éviter l’exclusion, il parait donc essentiel de mettre en place des mesures pour valoriser les qualités des personnes dyslexiques. Ainsi, le diagnostic de l’enfant doit intervenir le plus tôt possible pour qu’il puisse bénéficier d’un accompagnement, comme l’orthophonie, au plus vite. Plusieurs dispositifs existent pour aider les enfants en classe comme des logiciels de vérification d’orthographe, du temps en plus pour les devoirs sur table ou des auxiliaires de vie scolaires (AVS). Mais là, c’est encore un autre problème : obtenir ces dispositifs relève souvent du parcours du combattant pour les parents qui veulent simplement donner toutes leurs chances à leur enfant.

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