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Comment le vélo peut prendre la place qu’il mérite dans les déplacements domicile-entreprise

14 mars 2023

Comment le vélo peut prendre la place qu’il mérite dans les déplacements domicile-entreprise

La moitié des français réside à plus de 9km de son lieu de travail et un tiers parcourt des distances inférieures à 5km pour aller travailler. Malgré cela, le mode de transport le plus utilisé pour se rendre au travail reste très majoritairement la voiture. Pourtant, on note une progression de la part du vélo dans les transports domicile-entreprise, constat à mettre en relation avec l’augmentation des aménagements pour cyclistes dans les grandes villes et le souci croissant de limiter la pollution de l’air. Quels leviers reste-t-il alors à envisager pour augmenter le report de l’usage de la voiture sur le vélo et lui donner la place qu’il mérite ?

La voiture, mode de transport privilégié des Français

Quelle que soit la distance à parcourir entre le domicile et le travail, la voiture reste le mode de transport le plus utilisé. Selon une étude de l’INSEE de 2017, en moyenne, les Français déclarent à 74% utiliser leur voiture pour se rendre au travail, 16% en transports en commun et 8% en modes de transport doux, dont 6% à pied (comprend la marche, la trottinette et les rollers) et 2% à vélo. Logiquement, plus les Français sont éloignés de leur lieu de travail plus ils se déplacent en voiture. Mais pour les distances inférieures à 10km, qui représentent la distance idéale maximum à parcourir à vélo pour se rendre au travail, même si la part de la voiture diminue au profit des modes doux (marche ou vélo), elle reste le mode de transport privilégié dans 78% des cas.

Mode de déplacement principal pour se rendre au travail selon la distance à parcourir :

Source INSEE

Un lien fort entre pratique du vélo et faible efficacité de la voiture

La faible pratique du vélo dans les zones éloignées des grandes villes et dans leur périphérie pourrait s’expliquer par un allongement des distances mais il n’en est rien. Le vélo est peu disqualifié par des distances de déplacement élevées et même pour les distances comprises entre 0 et 1 km, la voiture est utilisée dans 48,8% des cas.

Mode de déplacement principal pour se rendre au travail selon la catégorie de commune de résidence :

Source : INSEE, recensement de la population 2017, exploitation complémentaire ; distancier Metric-OSRM (distances par la route), ©les contributeurs d’OpenStreetMap.

En revanche, à l’échelle d’une même agglomération, des études ont montré que la part du vélo dépend beaucoup de l’efficacité relative de la voiture, de sa vitesse et de la facilité de stationnement. C’est ce qui explique le très fort différentiel du taux de pratique du vélo entre les déplacements en centre-ville et les déplacements périphériques à distance égale au sein d’une même agglomération. C’est également ce qui explique le très fort différentiel entre territoires.

L’analyse des vitesses moyennes de la voiture sur les déplacements cibles du vélo (distance de 5 km) montrent clairement que la part du vélo est plus élevée quand la vitesse de la voiture est plus faible. Ainsi, résider dans une grande commune ou sa proche banlieue incite davantage à diminuer l’usage de la voiture que résider à proximité de son lieu de travail.

Au sein des grandes villes, c’est à Grenoble et Strasbourg que les habitants utilisent le plus les modes doux pour aller travailler, notamment le vélo (17 %).

La France a installé 2 638 km de voies cyclables en 2022

Encouragées par la crise sanitaire, les régions se sont massivement lancées dans la création de pistes cyclables. En test au déconfinement, elles ont été, pour la plupart, pérennisées depuis.

En 2022, la région qui a aménagé le plus de pistes cyclables en nombre de kilomètres est le Grand Est avec 388 km supplémentaires, puis les Hauts-de-France (380 km) et l’Occitanie (351 km).

Le top 3 évolue légèrement si l’on compare les pourcentages d’augmentation : la Normandie arrive en tête (+ 8,26 %, de 3240 à 3507 km), suivie de près par les Hauts-de-France (8,23 %, de 4620 à 5000 km) puis la Provence-Alpes-Côte d’Azur (+7,37 %, de 1913 à 2054 km). La Bourgogne-Franche-Comté (+ 1,22 %, de 3598 à 3611 km) se place bonne dernière.

Source : Géovélo

Davantage de pistes cyclables mais surtout davantage de continuité entre ces pistes !

À partir de l’analyse des données de fréquentation des pistes enregistrées en 2022, le bulletin annuel de Vélo & Territoires a recensé une hausse de 8 %. Mais elle est impulsée principalement par les zones urbaines où le nombre de passages a bondi de 10 %. Car un autre frein à l’utilisation du vélo, surtout constaté en dehors des grandes agglomérations, est l’absence de voies aménagées exclusivement dédiées au vélo et surtout de connexions entre elles.

Le linéaire cyclable en France est significatif (0.67 ml/habitant) mais ses discontinuités limitent très fortement son utilisation. Dans ce contexte, et comme le montre l’exemple de Séville ou d’autres villes espagnoles comme Valencia, la suppression des discontinuités aurait certainement un impact sur la pratique et un rapport coût/efficacité nettement meilleur qu’une extension rapide de voies discontinues.

L’objectif de 2 ml/habitant de pistes cyclables dédiées aux cyclistes et voies vertes représente 134 000 km en France pour 45 500 km actuellement (Géovélo, 2020) ou 60 000 km si l’on considère l’ensemble des aménagements y compris les bandes cyclables, double-sens cyclables et voies bus ouvertes aux vélos soit 91 000 km en site propre à réaliser.

Le potentiel considérable de l’assistance électrique

Selon une étude réalisée pour l’ADEME en 2020, l’assistance électrique du vélo permettrait à elle seule de faire progresser de 13 % la part de salariés utilisant le vélo pour leurs trajets domicile-entreprise, soit un doublement du potentiel théorique du vélo classique. Il s’agit d’un potentiel considérable et les études terrain confirment le phénomène : le VAE permet de toucher de nouveaux territoires (rural, péri-urbain, banlieue), des nouveaux publics (plus de femmes, plus de +50 ans), des déplacements nettement plus longs avec une fréquence de pratique utilitaire beaucoup plus élevée.

La santé, le porte-monnaie, la consommation d’espace, la congestion des routes, le bruit, les émissions de gaz à effet de serre, les retombées économiques et touristiques…, les avantages du vélo sont nombreux. Les collectivités ne s’y sont pas trompées en redoublant d’efforts pour encourager la pratique, lesquels commencent d’ailleurs à porter leurs fruits. Mais Le gouvernement souhaite accélérer l’utilisation du vélo dans les trajets du quotidien et a pour cela annoncé un plan vélo de 250 millions d’euros pour l’année 2023. Au programme : développer une filière de vélos made in France, aménager encore des pistes et créer davantage de parkings sécurisés.