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Ré-humaniser le management

14 mars 2023

Ré-humaniser le management

Manager a toujours été difficile, parfois ingrat. Les techniques de management évoluent avec le temps, mais toutes ne sont pas efficaces, loin s’en faut. Et même s’il n’existe pas de posture managériale foncièrement mauvaise, le management directif a aujourd’hui tendance à disparaître au profit d’un management davantage humaniste. Mais de quoi s’agit-il ?

Si un « bon » manager – celui qui dirige, sait ce qu’il faut faire et prend seul les décisions – est rassurant pour de nombreux collaborateurs, un courant se développe depuis 20 ans en France : un mode de management moins directif et nettement plus ouvert, le management humaniste. Dans ce cadre, les collaborateurs donnent leurs avis, cultivent leurs talents, épanouissent leur créativité et peuvent influencer les prises de décisions. Les entreprises tentent ainsi de passer d’un management basé sur la subordination à un management basé davantage sur le mode humain. Mais quelles sont les caractéristiques des deux types de management et leurs impacts ? Quels sont les leviers pour passer à un management humaniste ?

Le management directif ou management autoritaire

Le management directif, ou basé sur la subordination, est très organisationnel, faiblement relationnel et centré sur le résultat. Il se caractérise par le fait :

  • D’orienter, de diriger et de donner les instructions,
  • De peu ou pas expliquer,
  • De limiter les initiatives et l’autonomie,
  • D’être peu centré sur la personne,
  • De programmer, de planifier et d’indiquer les procédures,
  • De surveiller et de contrôler, d’organiser une communication descendante.

C’est un management préconisé dans les situations d’urgence ou de crise, mais qui ne devrait pas exister au-delà de cette exception. En effet, manager de façon directive amène à une perte de sens des collaborateurs, à un moindre engagement (ou démission silencieuse, autrement appelée quiet quitting, cf. newsletter de janvier) et au final à une possible démission.

C’est aussi un management qui s’est répandu dans les dernières décennies, notamment dans le service public, pour répondre à une politique de chiffres. Une méthode d’optimisation qui se concentre sur le pilotage d’indicateurs liés à la production et à la supervision, un management au fichier Excel en quelque sorte, qui a déshumanisé la relation managériale.

Le management humaniste, l’humain au centre

Le management humaniste, c’est lorsque l’humain devient LA priorité de l’entreprise. Il est basé sur un projet commun et se fixe quatre règles :

  1. Donner du sens au travail : cela consiste à donner à ses collaborateurs une réponse à la question pour quoi est-ce que je fais ce métier ou cette mission (et non pas pourquoi) ? En clair, on donne un but au collaborateur et non un objectif, on donne du sens au travail.
  2. Apporter de la reconnaissance à ses collaborateurs : il faut pour cela aimer ses collaborateurs, prendre en compte la valeur de chacun et ce qu’il a à apporter à tous. Cela consiste à penser que les hommes ne sont pas des ressources mais qu’ils ont des ressources.
  3. Faire preuve de cohérence et de transparence : le manager doit être cohérent dans ce qu’il dit et ce qu’il fait. Il doit aussi être un manager qui accepte de dire et qui ose dire quand il s’est trompé. La transparence confère une forme de confiance du collaborateur envers son manager.
  4. Faire confiance a priori à ses collaborateurs : c’est poser un regard bienveillant sur un collaborateur qui arrive dans l’entreprise et ne pas attendre les premiers résultats du collaborateur pour avoir confiance en lui… ses premiers résultats donnent confiance au nouvel embauché et c’est avant de les obtenir qu’il a besoin de la confiance de son responsable.

Le manager humaniste n’est pas un manager angélique, permissif ou consensuel. Il est au contraire un manager exigeant, avec lui-même et les autres. Il n’aura pas à faire assaut de psychologie positive ou à promettre le bonheur en entreprise. Il construit sur des bases solides et partagées des relations professionnelles plus ouvertes, plus confiantes, plus respectueuses, plus solidaires, en un mot plus humaines.

Avoir un management humaniste, au-delà du fait de donner la possibilité aux uns et aux autres de travailler dans un environnement plus agréable, permet de différencier l’entreprise pour attirer de nouveaux talents, également fidéliser les collaborateurs actuels et renforcer leur engagement.

Et sur un point du vue purement comptable, c’est également bénéfique. En effet, combien de temps perdu pour rattraper des incompréhensions de collaborateurs ? Quel est l’impact d’une personne en burn-out ? Quel investissement est requis pour mettre en place des formations liées à la gestion a posteriori des conflits ?

Comment tenter de devenir un manager humaniste ?

Nous vous avons convaincu (cela ne peut pas réussir si c’est imposé par l’extérieur), vous avez envie d’avoir une équipe engagée et investie, dans un système « gagnant-gagnant » ?

Au-delà des règles édictées ci-dessus, être manager humaniste c’est avant tout un positionnement qu’il convient de travailler : selon vous, quelle est la définition du management humaniste ? Comment y arriver ? Une fois que vous vous êtes posé ces questions, il faut co-construire avec d’autres collaborateurs (de votre équipe/d’autres équipes ou d’autres managers) pour avoir une vision globale et y passer du temps pour bien vous en imprégner.

Nous avons quelques pistes à vous soumettre.

Les feedbacks doivent être systématiques, non pas ceux que vous donnez, mais ceux que vous recevez : échanger sur ce qui a été apprécié ou ce qui a dérangé et les moyens d’évoluer.
Le manager doit savoir affirmer ses convictions, non pas en opposition, mais avec l’autre. Chacun est encouragé à donner son avis et le désaccord est accepté : le manager n’a pas besoin de convaincre à tout prix. Mais c’est ensuite à lui de savoir quand une décision doit être actée, de fixer le cap et de l’assumer, y compris quand il s’est trompé !

Une autre idée essentielle du management humain, c’est de ne pas juger !  Le manager est là pour animer et décider. Il s’appuie sur ses capacités de logique mais ne porte pas de jugement de valeur : les actions des collaborateurs peuvent être conformes ou non au cadre défini et il faut savoir en tirer des conclusions. C’est le jugement qui engendre le sentiment d’être méprisé, pas le fait d’être en désaccord.

Enfin, le manager humaniste adopte aussi une méthode appréciative. En rupture avec les pratiques traditionnelles qui cherchent constamment à analyser ce qui va mal au sein d’une équipe ou d’une organisation, la méthode appréciative consiste, à l’inverse, à prendre en considération et à partager collectivement ce qui fonctionne bien.

Il est bien entendu que le premier objectif d’une entreprise est de gagner de l’argent et de se développer. Mais l’entreprise est aussi un acteur à part entière de la société, qui interagit avec et sur son environnement : elle contribue à la formation des individus, elle intervient sur la santé de ses collaborateurs qu’elle doit préserver, elle agit sur l’environnement sur lequel elle doit minimiser son empreinte, elle a un impact sur l’état psychologique (et donc productif) de ses salariés, selon sa capacité ou non à rassurer, à communiquer une vision, des projets et à les ancrer dans une stratégie et des actions cohérentes. Il est plus efficace de parvenir à un engagement volontaire plutôt que contraint par un cadre oppressif. Et cela s’obtient en respectant les collaborateurs, en reconnaissant et en intégrant leur position centrale dans l’organisation, en instaurant un partenariat basé sur une très bonne connaissance de l’humain, une confiance partagée, de l’exigence, accompagnée d’un développement de l’autonomie et des compétences, bref une démarche humaniste.

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